70

 

Tout en tripotant machinalement les préservatifs qu’il venait de fourrer dans sa poche, Tom contempla le cadavre de Cecil.

La raison pour laquelle il tenait à voir les restes du pompiste n’était pas très claire dans son esprit. Une façon de se préparer, peut-être. Ou bien une attirance morbide. Après tout, il risquait de se retrouver bientôt dans le même état.

Il crut saisir un mouvement et braqua le rayon de sa torche. Avec une grimace de dégoût, il découvrit une poignée de gros vers blancs rampant sur la dépouille.

— Merde.

Il les observa qui se tortillaient autour des différents orifices, fasciné, jusqu’à ce que l’odeur de charogne l’oblige à se pincer les narines. Il laissa retomber la bâche de camouflage et retourna dans la rue.

Le ciel était d’un noir d’encre. Les nuages s’étaient rassemblés devant la lune et les feux des projecteurs montaient autour du Frigo, tels des spots de la Twenty Century Fox. S’il n’avait pas été mort de trouille, Thomas aurait trouvé le tableau plutôt réussi.

Des étincelles crépitèrent à l’intérieur du bâtiment, derrière les hautes fenêtres.

— Prenez ce truc, dit Cameron en lui tendant sa masse hérissée de pointes. On ne sait pas ce qu’il trafique, là-dedans. Les étincelles que vous apercevez durent depuis plus d’une heure.

Le flic était assis sur une couverture, le dos calé contre la carcasse du bus, sa jambe blessée étendue devant lui. Peter se tenait sur sa droite, les genoux ramenés contre la poitrine. L’enfant adressa à Tom un petit sourire faiblard, et il sentit son cœur se serrer.

— Je n’ai pas besoin d’arme, dit-il.

— Prenez au moins un couteau, insista Cole.

— Non.

— Vous êtes cinglé.

— Si vous croyez qu’on peut vaincre Seth avec ce genre de choses, c’est vous qui êtes fou.

Cameron parut soupeser l’argument, puis acquiesça d’un hochement de tête. Elizabeth s’avança. Tom faillit avoir un mouvement de recul, mais contre toute attente, elle le prit dans ses bras.

— Bonne chance, dit-elle simplement.

Il respira l’odeur de son corps. Le souvenir de leurs étreintes l’envahit.

— À tout à l’heure, murmura-t-il.

— T’as intérêt.

— Ouais.

Elle le repoussa avec douceur et se détourna.

Un nouvel éclair crépita derrière les hautes fenêtres. L’air était chargé d’ozone, et Thomas eut l’impression d’entendre la houle dans le lointain. Il n’avait qu’à fermer les yeux pour revoir l’océan.

La jetée de Santa Monica, ce fameux soir.

— Si je ne suis pas de retour dans dix minutes, partez. Suivez la route en progressant le plus vite possible.

Il aurait voulu sortir une phrase profonde et intelligente. Expliquer à Elizabeth combien il regrettait de ne pas l’avoir rencontrée plus tôt. La remercier pour sa tolérance – et beaucoup d’autres choses. Mais il était trop tard pour tout.

Alors il marcha jusqu’à la porte…

 

Il sort.

Tom n’est resté aux toilettes qu’une seconde, le temps de vider sa vessie. Dehors, le ciel est en furie. Le vent souffle et les embruns fouettent son visage. Une voix s’élève près du quai. Il n’entend pas les paroles.

— C’est toi, Gros ?

Quelle idée de lui donner rendez-vous à une heure pareille ! La baie de Santa Monica tout entière oscille dans le vent. Les vagues malmènent le ponton. On dirait qu’un ouragan s’apprête à leur tomber dessus…

Il boutonne son blouson, contourne le restaurant Moby’s Dock et avance sur le parking. Il plisse les yeux pour essayer d’y voir. Pas évident. Il y a trois voitures, l’une derrière l’autre. Une Dodge, et deux autres, qu’il distingue mal. Cette tempête est un véritable enfer. Il appelle encore.

Pas de réponse.

Alors il escalade le grillage, saute, et…

 

Se retrouve dans le Frigo.

Il referma la porte et leva les yeux, surpris. Tout en haut grésillaient les néons. Une pluie fine tombait sur ses épaules.

« Le système anti-incendie », pensa-t-il. Il y avait de la fumée dans le fond du hangar. Les capteurs s’étaient certainement déclenchés. D’où l’arrosage. Sauf que là, les gouttes avaient la couleur du sang.

L’eau des canalisations n’avait pas été purgée.

Thomas avança. Quelle idée d’installer un système anti-incendie dans un endroit pareil ? on se le demande.

Il alla jusqu’aux palettes, puis s’arrêta. Il hésitait à s’engager plus loin. La fumée venue du fond noyait l’espace entre les allées. Un coup d’œil en arrière lui apprit que le quad était toujours là. Trois pas à peine, et il montait dessus.

— T’aurais dû te tirer, dit une voix. Maintenant, c’est trop tard.

 

— Qu’est-ce que tu dis ?

— Que tu ferais mieux de te tirer avant qu’il soit trop tard.

La voix vient des barrières près de l’océan. D’abord, Tom n’y voit que dalle, rien que des vagues immenses qui s’avancent pour frapper le ponton. Il sent leurs chocs sourds et répétés grimper le long de ses jambes. Une sorte de grue est tombée à la mer, tout à l’heure. C’est elle qui doit cogner, charriée par le flot. Il se demande si les piliers de soutènement sont aussi solides qu’ils le paraissent. Puis il voit la silhouette.

Gros Bob est là, près du bord.

— Hé ! crie Tom…

 

— … T’es un putain de psychopathe.

— Tu trouves ? répondit Seth.

Sa silhouette venait d’émerger de l’allée, vêtue d’un treillis de combat militaire. Il balaya le décor alentour d’un geste désinvolte.

— Que penses-tu de ma petite reconstitution ?

Un néon explosa et vint se fracasser sur le sol dans une pluie d’étincelles.

— Je dirais que l’éclairage est naze.

— Pas très gentil. Je me suis donné un mal de chien. Regarde.

Seth exhiba une télécommande et appuya dessus. Un autre néon s’écrasa. Juste à côté de Thomas, cette fois.

— Tu reconnais ? La pluie, les éclairs de feu. On est en plein dans la Septième Plaie. (Il sourit.) Je suis le roi du gadget télécommandé. Tu te souviens du crash de l’avion ? Pas mal, hein, le pilotage automatique ? je l’ai bricolé en moins de deux heures et…

— C’est bon. Où est Lenny ?

— Oh, pardon, dit Seth d’un air désolé. J’oublie que nous avons affaire au Chevalier Lincoln ! L’homme prêt à tous les sacrifices pour sauver ses amis !

Thomas s’avança. Seth exécuta un petit pas de danse.

— Alors tu veux voir ton pote ? Suis-moi…

 

— Qu’est-ce que tu attends ?

Les mots sont emportés par le vent.

Tom rejoint l’autre gamin, dont les jambes sont suspendues dans le vide tandis qu’il se tient à califourchon sur une poutrelle. Face à eux, l’océan est un immense gouffre noir. Comme la gueule d’un Léviathan.

— Extraordinaire, hein ? dit Gros Bob.

Tom regarde son ami. Son seul, son unique véritable ami. Ses pupilles sont dilatées. Un sourire sauvage danse sur son visage. Il a l’air d’un fou.

D’ailleurs, c’est ce qu’il est.

— Qu’est-ce que tu branles ?

— Mate un peu, Tommy Boy. Il paraît qu’un tas de débris traînent dans les parages. Depuis la tempête de janvier, les gens viennent piller des objets et récupérer des souvenirs…

— Ça fait deux mois. Il reste plus rien.

— Ouais. Peut-être. Une partie du ponton est foutue et le reste est instable. « for-te-ment dangereux » à ce qui paraît.

— On doit plus venir ici. C’est interdit. Une grue de déblayage vient de tomber à l’eau.

Gros Bob hausse les épaules.

— Parce que tu te préoccupes des interdictions, toi ?

— Non, Seth. Je me préoccupe de toi.

C’est la première fois que Tom l’appelle par son prénom.

Seth se tourne vers lui et le regarde. Dans ses yeux, il y a de la tristesse. Un gouffre infini, plus profond encore que celui de la mer qui rugit devant eux.

Et Thomas sait. Il sait que ce n’est pas du chiqué.

— Lilian Gordon, dit Seth. Tu sais, ma mère…

— Oui ?

— Elle va m’assassiner.

 

Thomas suivit Seth jusqu’au fond du hangar.

Contre le mur gisait le corps de Lenny.

Ses cheveux blancs étaient sales et poisseux, collés par l’eau rougeâtre, et lui tombaient devant la figure. Son cadavre était allongé, menton sur la poitrine, les bras en croix. Lui qui soignait tellement son apparence.

Thomas reconnaissait la pose, bien sûr. Il se souvenait parfaitement du jour où la mère de Seth avait été retrouvée dans cette position.

— Lui, il n’a pas reçu une balle dans la tête, dit doucement Seth. Je l’ai électrocuté.

Alors, Thomas se redressa et…

 

… regarde les lumières de Santa Monica.

Il est encore temps de rentrer. De faire marche arrière.

— Tu dis n’importe quoi.

— Je t’assure qu’elle veut me tuer, répond Seth.

— Elle délire.

— Depuis l’arrivée du bébé, elle ne mange plus. Elle roupille de plus en plus. Elle se fringue même plus.

— Elle doit juste être un peu déboussolée. Paraît que ça leur arrive après un accouchement. Ton père…

— Il sait que dalle ! coupa Seth. Ou bien il s’en fout. Y a que son travail qui compte.

— T’en as parlé à ton psy ?

— David ? Nan.

— Tu lui as rien dit ?

— Il croit que c’est moi, le problème.

— N’empêche qu’elle t’aime, répète Thomas en fermant les yeux. C’est ta mère. C’est forcé.

Seth lâche un rire sinistre.

— Tu sais quoi ? J’en viens presque à regretter les moments où elle me tripotait.

— Tais-toi.

— Sans déconner. Au moins, j’étais tranquille. Maintenant qu’elle me frappe, c’est de plus en plus difficile et…

Thomas se bouche les oreilles. Il ne veut pas écouter ça. C’est insupportable.

Seth l’attrape par les épaules et le force à le regarder en face.

Le vent. Les yeux. Le gouffre.

— Elle met des gants en latex. Je te l’ai déjà dit ? Elle ne supporte pas de me toucher de ses propres mains, alors elle enfile ces trucs. Ça me fait bizarre quand elle me caresse avec.

— Arrête…

— La dernière fois, j’ai remarqué de drôles de plaques sur ma bite. Je dois commencer à être allergique à ses gants. Ça gratte, comme quand on touche des orties, sauf que c’est situé sur la peau de mes couilles, elles enflent comme des ballons et…

— arrête ! hurle Thomas en levant la main.

 

Son poing heurta le visage de Seth avec un bruit mat. Ce dernier tituba et fit deux pas en arrière, l’air étonné.

La pluie tambourinait sur son crâne chauve et dégoulinait de part et d’autre de son arête nasale. De la main tenant la télécommande – qu’il n’avait pas lâchée – il frotta sa lèvre fendue.

— Pas mal, dit-il. Rapide, mais tu cognes toujours comme une lopette.

Thomas et lui commencèrent à se tourner autour. La fumée enveloppait les palettes, les faisant ressembler à des vagues stoppées en pleine course. Thomas crut entrevoir des formes humaines, au-delà, mais préféra ne pas regarder. Il n’avait pas envie de voir des fantômes d’enfants morts en train de le supplier de leurs petits bras tendus.

Il plongea les poings dans ses poches, récupéra leur contenu et se remit en garde.

Seth parut n’avoir rien remarqué.

— Tu vois ça ? dit-il en désignant le moniteur Wescam suspendu à son cou. Je vous observe avec. Depuis le premier jour. Vous n’aviez aucune chance de m’échapper, le village est truffé de caméras. Infrarouge, vision nocturne… Il y en a partout. J’ai toujours eu le contrôle, mon vieux. En permanence.

Il retira le moniteur et le jeta par terre. Thomas continua de tourner autour de lui. Seth cliqua sur la télécommande.

— Quant au dernier de mes gadgets, surprise…

Il remua les sourcils.

— Un : armement des explosifs.

Nouveau clic.

— Deux : verrouillage de la porte.

Un large sourire fendit son visage livide strié de rigoles rouges. Il balança la télécommande à son tour, et se mit en garde.

— Voilà. Personne ne peut ni entrer ni sortir, à présent. C’est entre toi et moi, Tommy Boy.

 

— Pourquoi tu m’as fait venir ?

Tom est en colère. Gros Bob n’a même pas essayé d’esquiver. Ce coup, on aurait dit qu’il l’attendait.

— Quoi ? dit le gamin. On n’est pas bien, là, tous les deux ?

La tempête couvre quasiment leurs voix. Le vent salé leur arrache des larmes. Un éclair déchire le ciel et, l’espace d’un instant, Tom voit distinctement un morceau du ponton, au bout, disparaître dans les vagues.

— Non mais t’as vu ça ? Faut se tirer en vitesse !

— Je reste ! répond Seth. Elle aura pas ma peau !

Une vague approche. Monstrueuse. Thomas la regarde. Il voit que Seth la regarde aussi.

— Un géant arrive, et il va marcher sur Los Angeles ! hurle l’enfant. Cette fois, pas besoin de corde ! Pas de nœud coulant ! N’essaye pas de me sauver !

Son visage est zébré par les éclairs. Tantôt blanc, tantôt noir.

Puis la vague s’abat sur eux.

 

Tom eut l’impression que sa figure venait d’entrer en collision avec un train. Il vola dans les airs et s’abattit contre une palette. La pile s’effondra derrière lui. Des étincelles dansèrent devant ses yeux. Un instant, il crut qu’il allait perdre connaissance, mais parvint finalement à s’asseoir.

Seth n’avait même pas bougé en lui balançant ce terrible crochet du droit. Il pencha son visage sur le côté et lui adressa un petit signe de la main, paume vers le haut, quatre doigts repliés, pour lui indiquer de revenir à sa rencontre. Bruce Lee dans Le Jeu de la mort. Ils avaient adoré ce film. Tous les deux.

Thomas se leva pour retourner se battre.

 

— Chiotte, gémit-il.

Sur sa gauche le ponton a cessé d’exister. Qu’ils soient encore en vie tous les deux tient du miracle.

Seth n’a pas sauté dans l’eau comme il s’y attendait. Il est encore là, désemparé. Un enfant de treize ans cramponné à un poteau de bois au milieu d’un cyclone. Apparemment, cet abruti préfère mourir plutôt que de laisser sa mère le reprendre. Des débris volent autour d’eux.

Demain, le journal titrera : « 2 mars 1983 : après la tempête de janvier, une seconde, plus terrible encore, s’est abattue cette nuit sur le sud de la Californie. Les deux tiers du ponton de Santa Monica ont été engloutis, emportant les bâtiments, plusieurs véhicules et une grue. Détails et photos pages suivantes. »

Dommage, songe Tom dans un bizarre éclair de conscience. Il avait prévu de filer une cassette de Boy George à son ami. Ils n’auront pas le temps de l’écouter.

 

Thomas virevoltait comme un diable. Il toucha son adversaire au visage. À la tête. Au cou.

— C’est quoi, ça ? ricana Seth. Des caresses ?

Son poing partit comme un météore. Thomas l’évita sans même savoir comment, passa sous lui et l’effleura à la nuque.

Seth se retourna et lui enfonça la cage thoracique d’un coup de pied.

 

— Accroche-toi !

Seth tousse et crache, de l’eau salée plein la bouche.

— … moi la paix ! beugle-t-il.

— Ferme-la, dit Tom.

Il lui assène un nouveau coup de poing, qui lui ferme définitivement son clapet. Puis Tom charge son ami sur ses épaules.

 

Seth toussait d’une façon curieuse, mais ne souffrait pas. Il pétait le feu, même.

— Fais gaffe, dit Thomas, tu vas finir par t’enrhumer.

Son nez à lui saignait en abondance. La douleur irradiait d’un million d’endroits ; et il ne pouvait plus marcher. Pas grave.

Il effleura Seth encore une fois. L’autre ne fit rien pour l’éviter. Au contraire : il ouvrit la bouche pour lancer un nouveau sarcasme… et lâcha une quinte de toux.

Une lueur d’inquiétude passa dans le regard de Seth.

Il se gratta la nuque et les joues d’un air soupçonneux. Son visage semblait tout à coup énorme. Ses doigts ramenèrent un truc rose et gluant. Ses yeux s’agrandirent.

Puis il s’effondra.

 

Tom transporte son ami aussi vite qu’il le peut et traverse le parking sur pilotis, la tempête sur ses talons. Le ponton s’écroule par sections entières. La Dodge et les deux autres voitures viennent de partir à la mer, et un énorme camion frigorifique est en train de les rejoindre. À droite, une poubelle en plastique file dans le ciel.

Malgré ça, Tom reste confiant : la terre ferme n’est plus très loin. Le salut est là, devant lui.

Puis une partie du toit du Moby’s Dock s’envole à son tour, et il réalise son erreur : si l’ouragan ne les a pas encore emportés, c’est uniquement grâce à leurs deux poids combinés qui les maintiennent au sol.

À la seconde où il lâchera Seth, ils mourront tous les deux.

 

— Une… capote ? articula Seth, au bord du malaise.

Il glissa un doigt derrière son cou et en délogea une autre. Puis une troisième sous son aisselle.

Thomas se pencha au-dessus de son corps affalé par terre.

— Un préservatif, ouais, dit-il en vidant ses poches sur son visage. J’en ai tout un stock. Je suis resté un bon pickpocket, tu sais. Je peux dérober des objets. Et du latex, depuis quelques minutes, t’en as plein sur toi. Ça te rappelle des souvenirs ? Alors, Gros, toujours aussi mortellement allergique ?

À présent, la tête de Seth était complètement déformée par l’œdème de Quincke. Un son rauque sortit de sa bouche. Thomas comprit qu’il s’agissait d’un rire.

— Capote… Latex… Choc anaphylactique… Ha ! ha ! ha !…

Il avait l’air sincèrement ravi.

— … Peux pas me vaincre… Suis le plus fort… (Son cou difforme se tendit vers Thomas.) Suis un géant… Je marche sur Los Angeles, Tom… Retiens bien ça… Si tu veux me revoir… Je… marche… sur Los Angeles.

Il désigna la télécommande. Thomas nota le compte à rebours affiché dessus.

Zut. Les explosifs.

— Bon… T’as gagné, Tommy Boy… Voyons si… tu peux courir, maintenant.

 

Et Tom court, poursuivi par l’océan.

Il sait que s’il se retourne, ne serait-ce qu’une seule fois, le Léviathan va l’avaler. Le poids de son ami et leurs vies par la même occasion reposent sur ses épaules.

Devant lui, il y a la berge. Sur sa gauche, le carrousel avec ses chevaux de bois. Il n’a qu’une seconde pour prendre sa décision.

La terre ferme, c’est la sécurité, les maisons, le salut. Mais le carrousel tient debout depuis des lustres, malgré les tempêtes du Pacifique.

Du solide.

Il se concentre dessus.

 

Seth avait verrouillé l’ouverture du Frigo, et son corps bouffi reposait par terre. Un peu tard pour le supplier de rouvrir la porte.

Le cœur de Thomas se mit à cogner comme un dingue. Les chiffres du compte à rebours défilaient à toute allure.

Du calme. Réfléchis. Il reste le quad. Qu’est-ce que tu fais avec ? Tu fonces. Super-idée, sauf que tu peux aller nulle part. O.K., trouve autre chose. Tu t’en sers comme bélier. Pour défoncer la porte ? Oui. C’est débile ! Ouais, super-débile, même. D’accord, mais s’il y a une chance – une toute petite chance – pour que ça marche ?

Thomas se mit à courir.

 

Le vent hurle. Tom frappe contre la porte. Le carrousel est entouré d’une construction de bois, à peine une véranda, mais il n’arrive pas à l’ouvrir.

— Merde.

Son compagnon pèse des tonnes. Il n’en peut plus.

— Merde merde merde…

 

Le quad démarra au quart de tour. Il n’avait plus le temps de se poser de question. Il tourna l’accélérateur à fond.

Droit sur la porte.

 

Il frappe du pied. Du genou. De la tête. Cette satanée putain de porte doit s’ouvrir, sinon ils sont morts.

Trop tard.

La tempête est là. C’est foutu.

Il cogne encore une fois.

Deux.

 

La porte explosa, libérant Thomas à la vitesse d’une bombe. Les détonateurs s’actionnèrent.

Derrière lui montait le chaos.

L'Oeil De Caine
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